
Le frein des politiques
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1. Les politiques français cautionnent les pratiques de pêche déviantes en dépit des Lois Européennes
11.Exemple du merlu du Golfe de Gascogne
12.Exemple des filets dérivants et du thon rouge
13. Les multiples condamnations de la Cour de Justice Européenne ponctionnent le contribuable français mais nos politiques persistent
2. Les politiques français financent au-delà du raisonnable la pêche industrielle
21. L'exemple de Frédéric CUVILLIER
22. Le scandale des aides publiques
3.1 Le rapport secret de la cour des comptes (2010)
3.2 La cour des comptes affirme "le contrôle de la pêche ne doit pas être négocié avec la profession"(2012)
4. Le rapport accablant de l'ONG CLIENT EARTH sur le contrôles des pêches française (2017)
5. Pêche en mer : diagnostic d'une impasse politique
6.Écoutez la radiodiffusion de FRANCE BLEU GASCOGNE sur le sujet de la politique commune de la pêche (juillet 2018)

Même sous la gouvernance apparente de l’Union Européenne, le concept de Pêche Durable est constamment battu en brèche par l’égoïsme de certains états membres –la plupart-- qui veulent d’abord s’approprier la richesse, exactement comme un individu est tenté de le faire avant que son voisin ne s’en empare.
« Les administrations et le pouvoir politique français est plus que tout autre au service de la corporation des pêcheurs. » (Christian LEQUESNE « L’Europe Bleue. A quoi sert une politique communautaire de la Pêche ? » Paris, Presses de Sciences Po, 2001).
Cité par Philippe CURY (« Une Mer sans Poissons » Calmann-Lévy, 2008) qui précise:
« Les hommes politiques français prennent invariablement fait et cause pour la pêche. …en décembre 2002,…le président CHIRAC déclare qu’il est temps qu’une « vraie étude scientifique » soit menée pour connaître l’évolution des ressources marines » histoire de gagner du temps et de renvoyer à plus tard les mesures de conservation et de protection « comme si rien n’avait encore été fait dans ce domaine. »
« La France tolère les fraudes avec une complaisance impressionnante. La nature corporatiste et centralisée de la relation entre l’État Français et les pêcheurs…se mesurent à la faiblesse des amendes administratives, dont les montants sont dérisoires par rapport aux bénéfices escomptés. »
11. Le merlu du Golfe de Gascogne
« La France n’est pas un modèle en matière de contrôle de la réglementation des pêches. Depuis bientôt 30 ans, la Commission de Bruxelles lance des rappels à l’ordre à l’encontre de notre pays en raison de la capture de poissons sous taille dans le Golfe de Gascogne (NDLR : merlu juvénile). L’affaire est allée jusqu’à la Cour de Justice Européenne qui dans un arrêt du 12 juillet 2005 a infligé à la France une amende de 20 millions d’euros, assortie d’une astreinte de 57,7 millions d’euros. Elle a en effet estimé que le laxisme des autorités de contrôle, les Affaires Maritimes, va à l’encontre des objectifs européens de conservation des ressources halieutiques…Le comportement était jugé particulièrement grave et persistant. »
12.Les filets dérivants et le thon rouge
Les grands filets dérivants (au-dessus de 2km5) ont été interdits à partir de 1992, puis interdits (quelle que soit leur taille) pour des grands poissons comme l’Espadon et le thon en 2002 (CE 1239/98). Ils ont même été définitivement exclus de la Mer Baltique, des Belts et de l’Oresund depuis 2008. (CE 2187/2005).

Mais 60 bateaux français continuent à utiliser les « thonailles » pour le thon sur le littoral méditerranéen, en toute illégalité, sous couvert de la manœuvre du Ministère de l’Agriculture et de la Pêche qui n’a pas hésité à émettre un « Permis de Pêche Spécial » sans prévenir la CICAT ni l’UE. (Commission Internationale pour la Conservation du Thon de l’Atlantique).
Le 10 août 2005, le Conseil d’État français retoque le gouvernement en statuant que les « thonailles » sont bien des dérivants interdits par l’Europe depuis 2002.
Qu’à cela ne tienne : l’avis du Conseil d’État du 10 août est régulièrement bafoué.
« En 2006, …Dominique BUSSEREAU, Ministre de l’Agriculture et de la Pêche, soutient les pêcheurs de thons rouges en Méditerranée contre l’avis de la CICAT. »
Il a fallu qu’un bateau de l’ONG OCEANA aille filmer les contrevenants au détriment de sa sécurité au printemps 2007 pour que l’UE décide enfin de fermer la pêcherie du thon en méditerranée (septembre 2007).
Mais ça ne suffira toujours pas : la France sera condamnée le 5 mars 2009 par la Cours de Justice de l’UE pour persister à utiliser des filets dérivants pour les thonidés (les fameuses « Thonailles »).
13. Les multiples condamnations de la Cour de Justice Européenne ponctionnent le contribuable français mais nos politiques persistent
La CJUE condamne à nouveau la France pour aides publiques illégales au bénéfice de l’Aquaculture et de la Pêche le 20 Octobre 2011 (affaire 504/09).
Voici ses conclusions (on évite de parler des sommes en jeu...):
« 1) En n’ayant pas exécuté, dans le délai prescrit, la décision 2005/239/CE de la Commission, du 14 juillet 2004, concernant certaines mesures d’aide mises à exécution par la France en faveur des aquaculteurs et des pêcheurs, en récupérant auprès des bénéficiaires les aides déclarées illégales et incompatibles avec le marché commun par les articles 2 et 3 de cette décision, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 288, quatrième alinéa, TFUE et 4 de ladite décision.
2) La République française est condamnée aux dépens. »

2.Les connivences et les largesses des politiques français avec la pêche industrielle
22. Frédéric CUVILLIER a été le ministre délégué à la Pêche du 15 mai 2012 au 31/03/2014, puis secrétaire d’état jusqu’au 25 août 2014.
Il faut aussi savoir que Frédéric CUVILLIER né à BOULOGNE SUR MER est le maire de BOULOGNE SUR MER depuis 2002 quand il est nommé ministre délégué des pêches maritimes en mai 2012.
Rappelons que BOULOGNE SUR MER est l’un des tous derniers ports de pêche français qui abritent les bateaux pêchant encore en eaux profondes et que la France n’est toujours pas disposée à les interdire. C’est le combat très avancé de BLOOM.
22. Sur la question des aides publiques au profit de la Pêche, la politique de la France est excessive. Et le contribuable étranglé.
Benoît MESNIL nous a bien résumé la situation dans son papier « Les crises soutenues par les subventions publiques dans le secteur de la Pêche en France » (Ocean and Coastal Managment, septembre 2008).
Il démontre que l’aide financière totale allouée à la Pêche est du même ordre de grandeur que la valeur générée par ce secteur, soit 800 millions € de subventions pour une valeur estimée à 1 100 millions €…
L'auteur aurait dû aussi comptabiliser les amendes infligées par la Cour Européenne de Justice.

Ce graphique présente toutes les aides publiques (nationales et européennes) reçues par le secteur français de la Pêche entre 1991 et 2006 (barres rouges), y compris la contribution de l’état pour les pensions et la sécurité sociale (pour les pêcheurs seulement : ligne solide à travers les barres rouges). En comparaison, la valeur marchande totale des débarquements (frais et congelés) métropolitains (ligne pointillée et cercles noirs). Unités : Millions d’€. Sources : Ministère de l’Agriculture et de la Pêche (Aides) et OFIMER (valeur marchande des débarquements).
En juillet 2013, le NOUVEL OBSERVATEUR et le MONDE titrent sur le rapport « très sévère » du conseil d’état qui « montre que le secteur de la Pêche en France ne survit que grâce à des fonds publics massifs.
En 2008, en excluant les flottes industrielles pour lesquelles les données ne sont pas disponibles, l’aide financière totale équivaut à 2,5 fois le bénéfice d’exploitation brut moyen du secteur et à 4 fois son bénéfice net après impôts ».
Le quotidien explique que Benoît MESNIL montre comment les subventions publiques ont été accordées en dépit de toute logique, de tout objectif ou de tout mécanisme de contrôle, et qu’elles ont été d’abord le résultat de pressions sur les autorités de la part de professionnels de la Pêche ou de leurs représentants.

3. La cour des Comptes
3.1 Le rapport secret de la cour des comptes (2010)
Le rapport secret sur la pêche française (2010)
Rapport de la Cour des Comptes sur les aides de l’État à la pêche (exercices 2000 à 2009).
"L'Obs" révèle les conclusions d’un rapport sévère de la Cour des comptes sur les aides à la pêche. Qui n’a jamais été rendu public…
Par Guillaume Malaurie
Publié le 09 juillet 2013 à 12h49
"Le rapport non publié de la Cour des Comptes sur les aides de l’État à la pêche, dont "le Nouvel Observateur" s’est procuré la version préliminaire est embarrassant pour beaucoup de monde. Il date de 2010, mais n’a pas pris une ride. C’est d’abord un véritable réquisitoire contre la plupart des politiques conduites dans ce secteur depuis plusieurs décennies. Ce sera aussi un boulet pour les négociateurs français, qui bataillent en ce moment même à Bruxelles dans un climat hostile.
Échec à atteindre les objectifs affichés
L’enjeu des débats est pourtant vital : la définition des nouveaux critères qui conditionnent les subventions européennes relevant de la politique commune de la pêche pour les sept ans à venir. Et ces critères, la très déterminée commissaire grecque Maria Damanaki les veut "intelligents", mais aussi "rigoureux" pour limiter la surpêche, interdire les rejets en mer et les méthodes de pêche en eau profonde les plus destructrices. L’enjeu étant que les stocks de poissons atteignent des niveaux durables dès 2015. Malgré des signaux encourageants, il y a en effet urgence : 75% des stocks seraient toujours surexploités…
Or, à lire le rapport de la Cour, la rigueur n’est pas la qualité première de la gouvernance française de la pêche. Sont épinglés, en vrac, "l’éclatement de l’organisation administrative" régissant la filière, son "dispositif d’aides perclus de contradictions […] que la raison ne gouverne pas", ses "exonérations illégales à l’euro-compatibilité douteuse", ou encore son "absence d’évaluation". Bref, selon la Cour, prévaut "le constat largement admis de l’échec à atteindre les objectifs affichés". […]
Sabordage ?
Le rapport très approfondi de la Cour des Comptes aurait-il été victime d’un sabordage ? Mystère. La Cour confirme que la procédure est allée à son terme, le 10 février 2010, et que les réponses des administrations mises en cause avaient été intégrées. "Une lettre d’information du président de chambre a d’ailleurs été remise aux autorités de tutelle", précise-t-on, un peu embarrassé, rue Cambon.
Sans doute. Sauf que cette lettre échappe, tout comme le rapport final, aux premiers intéressés : les parlementaires chargés du contrôle des dépenses publiques. Ceux-ci auraient pourtant pu se faire une idée plus précise de l’ampleur des aides disséquées par les magistrats financiers. Entre les subventions, les prises en charge des cotisations sociales, les plans d’urgence à répétition, le total se révèle à peu près équivalent au… chiffre d’affaires du secteur. Soit plus de 1 milliard d’euros. Sans compter les aides des collectivités locales, décrites par la Cour comme un "trou noir".
Que le secteur de la pêche soit subventionné au-delà de 100%, alors que l’agriculture ne l’est qu’à hauteur de 30% n’est pas forcément choquant, même si, rappelle la Cour, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, l’Islande et l’Australie ont supprimé les aides "sans connaître de marasme ou de désastre". Les subventions, d’accord, poursuivent les magistrats, à condition d’accompagner la filière pour l’aider à sortir à terme de l’étau qui l’étrangle. […]
3.2 En juillet 2012, la COUR des COMPTES a publié un autre rapport aussi court que cinglant sur le Contrôle des Pêches Maritimes en France. En voici quelques extraits choisis:
1. « L’organisation des Contrôle des pêches est très éclatée et inadaptée »
2. Ce contrôle est « insuffisant »
3.Les « assouplissements » à la Loi sont si nombreux que « l’exception devient règle de droit » en rappelant les multiples dérogations de chalutages à moins de 3 miles du littoral français (par exemple en Gironde, comme c’est systématiquement reconduit depuis que les 3 milles ont été prévus par la Loi). On y apprend que « certains de ces arrêtés ne respectent pas la réglementation européenne ».
4. Les sanctions administratives, en cas d’infraction sont quasi inexistantes, alors qu’elles peuvent être « dissuasives et atteindre un montant très élevés ou causer un préjudice important aux contrevenants, notamment en cas de suspension de licence »
5. « Le contrôle de la Pêche ne doit pas être négocié avec la profession. » On y lit ce que tout le monde sait : « Les administrations cèdent ponctuellement aux demandes de certains membres de la profession ».
6. En conclusion, la Cour (et les citoyens) « recommande que soit réaffirmée l’autorité de l’état ainsi que le caractère non négocié du contrôle des pêches. »
La réponse du MEDDE du 01-10-2012 est un mélange de « oui, mais », de « il n’y a qu’à » et de « il faut nuancer »…
Lire le rapport original (3 pages)
4 Le rapport accablant de CLIENT EARTH (2017)
En moins de 30 pages, les 2 juristes de cette ONG anglo-saxonne exposent d'abord l'organisation très complexe de l'administration de la pêche maritime en France, puis exposent une réalité très décevante qui n'étonnera pas les observateurs des pratiques françaises.
Entre 2013 et 2016, le nombre annuel de contrôles a baissé de 25% en passant de 6019 à 4531. Au fil du temps, la réduction est expliquée par des modifications réglementaires concernant le thon rouge, puis par des restrictions budgétaires, et enfin par les problèmes sécuritaires (terrorisme).
Seuls 33% des bateaux sont contrôlés une fois en mer, contrôles qui sont de loin les plus efficaces. Les procès-verbaux sont de l'ordre d'un millier par an, sans que l'on sache la correspondance avec les infractions concernées. Les chiffres diffèrent selon leur origine (Conseil National de Surveillance des Pêches, Direction des Pêches maritimes et de l'Aquaculture, Ministère de la Justice).
La DPMA ("une des administrations les plus fermées au monde" Une mer sans Poisson, Philippe CURY et Yves Miserey) a refusé de communiquer à propos des sanctions administratives effectivement prononcées. Aucune information ne filtre à propos du système obligatoire des points de pénalité prévu par le règlement européen et la cour des comptes européenne l'a dénoncé.
À propos des cas relevant du pénal, près de 90% des affaires échappent au tribunal et sont traitées par des "mesures alternatives": la "régularisation" où le contrevenant est simplement prié de promettre de ne plus recommencer, le "rappel à la loi" qui n'est guère différent, des sanctions non pénales ou une simple amende. Les 10% des cas traités devant les tribunaux se soldent par des amendes de 1675€ en moyenne.
On est très loin de la culture du respect de la Loi que la Politique Commune de la Pêche voudrait développer: la cour des comptes française avait dénoncé en juillet 2012 les pressions que le secteur professionnel pouvait développer pour interrompre avec succès des inspections compromettantes.
Le rapport cite références à l'appui 3 exemples édifiants à ce propos.
Mais que dire de cette "charte du contrôle" établie entre l'administration et les professionnels qui stipule qu'un bateau ne peut être contrôlé, sauf flagrance en cours, s'il l'a déjà été dans les 30 jours: comme si les radars s'abstenaient de flasher au prétexte que cette voiture l'avait déjà été dans le mois précédent...Voilà qui laisse les mains libres...
Pire que cela, en cas d'infraction grave, l'article L945-4-1 du code rural et de la pêche maritime interdit la peine de prison si le professionnel français en flagrant délit a agi en dehors des 12 milles ("eaux territoriales").
"Lorsqu'une infraction prévue aux articles L. 945-1 à L. 945-3 a été commise au-delà de la mer territoriale, seules les peines d'amende peuvent être prononcées."
Le message est clair: tous les auteurs français d'abus en dehors des 12 milles, notamment dans des mers lointaines n'ont pas grand chose à craindre des autorités françaises. Client Earth explique comment cette disposition de 2014 est exactement contraire à la Convention des Nations Unies concernant la Loi en Mer (UNCLOS), que la France a pourtant signé.
Les procédures dépendent aussi beaucoup de l'origine de l'autorité responsable: par exemple, la plupart des sentences judiciaires proviennent de la gendarmerie maritime, et les affaires maritimes y semblent beaucoup moins disposées. Il y aussi des inégalités selon les régions: contrôles plus ou moins complets, sanctions variables. Bref, il n'y aurait pas d'harmonisation ni de standard: cela dépend de l'autorité locale.
Au final, le rapport dénonce des contrôles en chute libre, des sanctions d'un niveau faible , non dissuasif, des données opaques et non fiables et un système de pénalité toujours inopérant, alors qu'il existe depuis des années maintenant.
Il est recommandé d'augmenter significativement les contrôles en mer, d'améliorer ceux au débarquement, de supprimer cette période sans contrôle de 30 jours, de réintroduire les doubles peines dans les cas graves, de simplifier les contrôles et les procédures, de coordonner les différentes autorités, de normaliser les pratiques, de prononcer des sanctions réellement dissuasives et d'améliorer la transparence et la fiabilité des données concernant ce domaine ultra confidentiel.
La circulaire d'orientations de politique pénale en matière d'atteinte à l'environnement du 21 avril 2015 a explicitement exclu de son champ d'action les infractions concernant la pêche maritime au prétexte que ces affaires méritaient un traitement spécifique: la circulaire spécifique en question se fait toujours attendre!...
La situation administrative paraît ainsi à l'image de la situation sous-marine: en perdition.
À lire absolument (en français)
5. Pêche en mer : diagnostic d'une impasse politique
Depuis quelques années, le déclin de la pêche du bar est devenu une expression très tendance dans notre pays hyper dépendant de l’espèce. Cette réalité est d’autant plus vraie que les mesures prises actuellement ne garantissent en rien sa pérennité sur les années à venir. Mais alors que faire ? État des lieux d’une politique court-termiste et comparatif avec les mesures prises par d’autres pays...(lire la suite de l'article)
