
BEMEF, un modèle expert pour rendre durable la pêche en Europe
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Présentation de BEMEF, un modèle expert pour rendre durable la pêche en Europe
En 2012, l’UE semble avoir enfin décidé de remplacer le corporatisme par le rationalisme en matière de Politique Commune de la Pêche (PCP) : pendant que les scientifiques de la pêche (les Halieutes) multiplient leurs efforts pour décrire, comprendre et modéliser l’état de santé des écosystèmes, d’autres scientifiques font de même concernant les flottes de pêche européennes, en précisant leurs impacts environnementaux et socio-économiques. Ces travaux sont ensuite rassemblés dans un modèle écosystémique et bio économique capable de simuler l’effet de diverses options de la PCP : en résumé, un véritable système expert capable à tous les niveaux (régional, national et européen) de montrer le droit chemin en respectant scrupuleusement les Rendements Maximum Durables (RMD ou MSY en anglais), pierre d’achoppement de la bonne gestion.
La New Economics Foundation présente le BEMEF, modèle basé sur les travaux de l’Université de COPENHAGUE eux-mêmes inspirés du groupe de travail AFCM du Conseil International pour l’Exploration de le Mer (CIEM/ICES).
En mars 2015, le modèle BEMEF regroupait 24 526 bateaux de 221 flottes des 15 états membres pêcheurs de l’UE et 150 stocks de poissons contrôlés de 25 espèces commerciales qui représentent 73% des débarquements.
Au niveau européen, respecter le RMD ne réduirait pas la production bien au contraire, puis qu’il l’augmenterait de 68%. Les emplois directs augmenteraient de près de 5% et ce serait une vraie manne pour les emplois induits propulsés à plus de 50%. Et cette embellie ne se fera pas au détriment des salaires qui eux aussi augmenteraient de 35%. Tout ceci pour un bilan gaz à effet de serre (Colonne CO2) inchangé : on ne peut pas gagner sur tous les tableaux, mais gardons à l’esprit que les grands gagnants seront d’abord les écosystèmes, enfin exploités durablement (hypothèse de base du RMD).

L’attribution actuelle des quotas est basée sur l’antériorité historique de la flotte : en clair, on lui attribue la fraction de quotas qu’elle a l’habitude de pêcher.
La force d’un système expert est de permettre de tester beaucoup de stratégies d’attribution différentes: minimiser la consommation de gasoil, diminuer l’effort de pêche (puissance de propulsion des flottes), développer l’emploi, augmenter le rendement économique (soustraction faite des subventions). Autant de curseurs que vous pouvez faire varier pour tester votre politique : NEF vous y invite sur son site.
Par exemple, vous pouvez comparer le nombre total d’emplois générés sous différentes stratégies.


Vous constatez que la stratégie d’attribution qui chercherait à maximiser le nombre d’emplois (en rose) multiplierait par 2 le nombre d’emplois soutenus par la stratégie actuelle historique (en bleue). Mais BEMEF indique que les salaires s’en trouveraient inférieurs. On comprend ainsi qu’il faille trouver des compromis pour décider de quel panachage optimal sera faite la politique finale.
Au niveau national, les multiples différences entre états membres aboutissent à des différences importantes dans cette pluie d’effets positifs.
Les débarquements et les gains économiques varient dans des proportions considérables, on remarque même deux perdants qui seraient la Finlande au bord de la Baltique et le Portugal. Des explications sont avancées (surpêche avérée, plafonds durables mal évalués, restauration récente du Hareng en mer de Botnie pour la Finlande).

BEMEF est un projet qui recevra de multiples renforcements. Par exemple, il faudra :
1. inclure toutes les espèces de poissons qui ne sont pas encadrées par des quotas (le bar par exemple)
2. inclure toutes les flottes qui ne le sont pas encore (ce sont surtout les « petits » bateaux)
3. rajouter d’autres paramètres clés aux « entrées » du modèle : gros espoirs avec les « recrutements » R (données écosystémiques) qui décrivent le pourcentage de jeunes poissons d’une espèce donnée qui chaque année vient renforcer la cohorte des poissons en âge de se reproduire
4. tester d’autres critères d’attribution des quotas en dehors du critère historique en cours ou même des critères énergétiques, économiques, ou sociaux à panacher.
5. Améliorer la finesse du système (par exemple pour la pêche en eaux profondes), poursuivre le débat sur la fiabilité du calcul des RMD
6. Modéliser les relations temporelles complexes entre la pression de pêche, les paramètres du marché, la dynamique des écosystèmes, l’abondance des stocks, les innovations technologiques ou les mutations industrielles.
Au total, le modèle BEMEF devra devenir un modèle dynamique dans le temps pour modéliser la transition vers la pêche durable, les données en entrées devront être fiabilisées pour qu’elles représentent effectivement la réalité du terrain et BEMEF devra être étendue aux espèces sans quotas mais aussi à la Méditerranée.
En conclusion, BEMEF apporte la preuve, s’il en était besoin que « les bénéfices à long terme surclassent et balayent les coûts transitoires à court terme ». Ce sont pourtant ces « coûts à court terme » qui inhibent la classe politique qui devra réussir cette transition vers la pêche durable.
BEMEF démontre que la réattribution des quotas selon des scénarios à préciser suffit à elle seule à dégager des richesses nouvelles.
Toutes ces bonnes perspectives supposent que les politiques :
1. Respectent enfin les quotas conseillés par les scientifiques, prérequis de base.
2. Recherchent de nouvelles stratégies d’attribution de quotas partout où c’est possible sur leur territoire grâce à BEMEF
3. Utilisent le Fond Européen pour les Affaires Maritimes et la Pêche (FEAMP/EMFF) pour financer la nécessaire amélioration du recueil des données (flottes et stocks).
(Cet article tente de vulgariser l’article « Gestion des pêcheries européennes dans l’intérêt public : résultats du Modèle Bio Economique des Flottes Européennes BEMEF » mars 2015- lire le rapport original en anglais)
Rappel de la situation en France (et ailleurs):
